
SOMMAIRE
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Sentences des sept sages
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Periander
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1
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2
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3
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4
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5
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6
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Bias
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1
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2
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3
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4
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✦
5
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✦
6
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Pittacus
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1
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✦
2
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3
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4
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✦
5
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✦
6
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Cleobule
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1
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✦
2
-
✦
3
-
✦
4
-
✦
5
-
✦
6
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Chilo
-
✦
1
-
✦
2
-
✦
3
-
✦
4
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✦
5
-
✦
6
-
Solon
-
✦
1
-
✦
2
-
✦
3
-
✦
4
-
✦
5
-
✦
6
-
Thales
-
✦
1
-
✦
2
-
✦
3
-
✦
4
-
✦
5
-
✦
6
-
De septem sapientibus
- ✦ Ausonii præfatio
- ✦ Chilo
- ✦ Periander
- ✦ Pittacus
- ✦ Cleobulus
- ✦ Solon
- ✦ Bias
- ✦ Thales
-
Les dix commandemens
- ✦
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- ✦
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Odes pour la vertu
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LES
SENTENCES
Du Poëte Ausone, sur
les
Dits des Sept Sages.
Odes, & autres compositions,
pour inciter à la
Vertu.
Le tout nouuellement traduit
& composé pour l'vtilité
d'un
chacun, par M. Charles Fontaine
Parisien.
A LYON,
Par Iean Brotot.
Auec Priuilege du Roy.

Extraict du Priuliege du Roy.
PAr grace du Roy il est permis
a maistre
Charles Fõtaine
fai[-]
re imprimer,
& mettre en
vẽ-
te par tel Libraire & Imprimeur que
bõ luy semblera,
les ditz des sept sages
a l'imitation du Poete
Ausonius, mis
de vers Latins en vers
François par le-
dit Fontaine à
l'utilité d'un chacun: &
autre cõpositions par luy faictes a
l'hõ[-]
neur &
augmentatiõ de la lãgue Fran[-]
çoise: auec defenses à tous autrs de ne
les imprimer ne vẽdre iusques à
huict
ans, du iour & date de la premiere im-
pression paracheuee. Comme à plain est
contenu es lettres de priuilege sur
ce
dõnees à Villiers Coteretz, le premier
iour
d'Octobre 1555. Ainsi signé
Des[-]
lauerie, &
scellé en cire Iaune.

[Figure]
A
TRESNOBLE ET,
Florissant Prince,
Monseigneur
le Duc d'Angoulesme, tiers
fils du Roy.
Charles Fontaine, S.
IL y a ia deux mille ans, ou plus (comme
i'ay
declaré au liure du Promptuaire des Medales,
qui a esté presenté
au Roy nostre Sire, vostre
tresillustre Pere) que les sept Sages de
Grece
ont escrit des Ditz notables, & si fort sentencieux qu'en-
cores auiourd'huy en ont ilz le bruit auec
l'honneur: partie
desquelz ditz, & sentences exquises a esté depuis
traduicte,
ou reduicte en vers Latins de diuerse sorte par le Poete
Au
sone: & ces iours cy
ie les ay außi mises en vers François de
diuerse taille, c'est a sçauoir
briefz ou longs, selõ que la qua
lité du vers Latin, &
proprieté du langage Frãçois, me sem
bloit le requerir:
& selon ma coutume, comme par cy deuãt
i'ay montré en mes plusieurs
Translatz d'Ouide, de Sym-
phose , & d'autres. Or considerant a part moy, que
ces
iours passez i'addressois aux Tresnobles Princes Messei-
gneurs voz freres certains autres
Translatz reuenãs & ap[-]
prochans à cetui cy, i'ay incontinent pensé & conclu, adres-
ser außi a vous ieune Prince Tresillustre (qui estes leur plus
A ij
[p. 4]
4
proche de noble sang Royal, & qui leur resemblez a la
trace des
bonnes mœurs, & de la vertu) ce miẽ petit labeur:
auquel i'espere que vostre
illustre & florissante ieunesse
prendra quelque fruict & plaisir. Que si
ce traité vous
semble petit, außi le suis-je, & de corps & de biens,
mais
d'esprit prest & prompt a vous obeir. Toutesfois pourrez
accompagner ce
petit liuret, de mes autres Translatz
des Mimes de Publian, & des Ditz des
sept Sages,
que i'adressois a mesditz Seigneurs
le Dau-
phin
& duc d'Orléans, voz Tresflorissans
freres. Dieu conserue vostre heureuse
noble ieunesse en toute prosperité.
De
Lyon ce premier iour du
moys de May.
1558.
(*)

SENTENCES
DES SEPT SAGES
de Grece,
nouuellement tradui-
tes des vers Latins
d'Ausone en
vers François, par M.
Charles
Fontaine: & ha chacun des
sept Sages
six
Sentences.
Et premierement de Periander,
en Vers
Phaleuces.
Premiere Sentence.
NVNQVAM discrepat vtile à decôro (vel
ab honesto) id est nihil vtile quo nō honestū.
Et Caton dit en son 1.
liure.
Vtilitas opibus præponi tempore debet.
Iamais vtilité
N est sans honnesteté.
Autrement.
A iij [p. 6]Le profit, ou bon heur,
N'est iamais sans honneur.

Autrement.
C’est quasi a reuenir au propos de Pla[-]La chose vtile
Onc ne fut vile.
ton, qui dit que ce qui est beau est bõ,
& ce qui est bon est beau: comme i'ay
prouué en ma contr'amie : ce que tou-
tesfois de prime face semble difficile, et
quasi paradoxe, comme pareillement
de dire ce qui est profitable, est hono-
rable: mais le poete philosophiquemẽt
conioint icy l'vtile & honneste, l'vtilité
& l'honnesteté, comme aussi fait Cice-
ro en ses offices. Et a la verité dire, quel[-]
le vtilité pourroit l[']on auoir en vne cho[-]
deshonneste & vicieuse: par laquel-
le, acquerant profit mondain, l[']on met-
troit l'ame, & l’honneur en peril, & dã[-]
nation: comme font ceux qui vsent de
[p. 7]

méchant gaing, illicite & defendu, en
commettant rapines, vsure, & extor-
sions. Aussi quand Ouide dit,
Turpe quidem dictu est, sed (si modo vera fatemur)
Vulgus amicitias vtilitate probat,
il ne conioint pas l'u-
tilité auec la vertu, & l'honnesteté.
2
Plus est sollicitus, magis beatus:(id est) quò quisque di-
tior, hoc magis sollicitus viuit.
Tant plus l'homme est hault éleué,
Tant plus de soing il est greué.
Autrement.
Plus de biens nous vient
Plus soucy nous tient:
Plus de biens il y a,
Plus soucy y va.
3
Mortem optare malum, timere peius.
Desir de mort, est vn malaise:
Mais la crainte en est plus mauuaise.
Autrement:
A iiij [p. 8]Mal fait quiconque mort desire:
Mais qui la craint fait chose pire.

Martialis in hanc
sententiam
lib.10.epigr.47.
Mortem nec timeas, nec optes.
Cato
Qui mortem metuit, quod viuit perdit id ipsum.
C'est a dire,
Il est vrayNe crains la Mort außi ne la desire:
Qui craint la mort perd le plaisir de viure:
qu'il en faut auoir souuenance, cõme
verrez cy apres que dit le sage Chilo,
Viue memor mortis, ne sis immemor & salutis.
4
Faxis vt libeat quod est necesse: (id est quod necesse est fa-
cere, fac vt libenter facias)
Reigle ta volonté
A la neceßité.
Autrement:
Pay que tousiours ton veuil soit ioinct
A ce que fuyr ne peut point.
Martialis in hanc
sententiam
lib.10.epigr.47.
Quod sis, esse velis: ubilque malis.
[p. 9]

& rien dauantage: c'est auoir conten-
tement des choses presentes.
Terentius quoque
Velis id qd poßis.Veuilles ce que tu peulx.
5
Multis terribilis, caueto multos. (id est quem multi ti-
ment,) is multos timeat. Multos timere debet (inquit Pub--
blianus ) quem multi timent.
Autrement.
De plusieurs te fais redouter,
De plusieurs tu te dois douter.
6
Si fortuna iuuat, caueto tolli:
Si fortuna tonat, caueto mergi.
(id est) ne extollaris
fortunæ, psperitate: neq; in rebus aduersis frangaris animo.
A v [p. 10]Si fortune est bonne,
N'en deuien sublime:
Si fortune tonne,
Pourtant ne t'abyme.

A ce propos dit Caton en son
4.liure.
Tranquillis rebus quæ sunt aduersa caueto:
Rursus in aduersis, melius sperare memento.
Durant le vent de la fortune bonne
Craindre te fault le vent d'auersité:
Et quand außi quelque mal t'enuironne,
Pren bon espoir d'en estre hors ietté.
Aucuns lisent ainsi:
Si fortuna iuuat, nihil laboris:
Si non adiuuat, hoc minus laboris.
Sentences de Bias.
Vers Héroïques.
1
QVÆNAM summa boni? mens quæ sibi cẽ[-]
scia recti.
En quoy gist nostre plus grand bien?
En n'estre coupable de rien.
Autrement.
De quel grand bien doit on plus auoir cure?
C'est d'un cœur net, & conscience pure.
A cecy conuient bien ce que dit
Caton
au commencement de son
liure.
Si Deus est animus (nobis vt carmina dicunt)
[p. 11]De Bias. 11
Hic tibi præcipuè sit pura mente colendus. Nam cu[-]
andum est id præcipuè vt sit mens sana in corpore sano.
A ce propos dit vn autre Poete,Si Dieu ainsi comme dit l'écriture
Est vn Esprit, ou essence trespure,
Il le faut donc en esprit adorer,
Et d'un cœur pur sainctement honorer;
Conseia mens recti, famæ mendacia ridet. & puis encores.C'est à di-[]
hic murus abæneus esto,
Nil conscire sibi, nulla pallescere culpa.
re, la bonne conscience ne craint les mẽ[-]
songes de la renommee: & sa fault ar-
mer d'un mur d'ærain, c'est de ne pal-
lir pour aucũ mal faict, & n'estre cou[-]
pable de riẽ: a ce propos aussi dit Catõ,
Cùm rectès viuas ne cures verba malorum.C'est a
dire,
En bien viuant, ne crains les paroles des méchans.
2
Pernicies homini quæ maxima? solus homo alter.A ce pro[-]
Homini pernicies maxima, pẽdet ab homine.
pos dit Publian,
Etiam capillus vnus habet vmbrã
[p. 12]suam: mesme vn petit poil de teste porte son ombre.
Autrement.Quel danger est le plus extreme
A vn homme? c'est l'homme mesme.
A ce propos conuiẽt le p[ro]uerbe latin,Qu'est-ce que l'homme doit craindre, en somme?
Qui luy est plus dangereux? vn autre homme.
Homo homini lupus.
L'homme est loup a vn autre homme.
3
Quis diues? qui nil cupiat: quis pauper? auarus.
Qui est le riche? cetuy la
Qui est content de ce qu'il a:
Qui est l'homme plus souffreteux?
Celuy qui est plus couuoiteux.
Autrement.
Qui est le riche, & heureux en ce monde?
Qui se contente, & aux biens ne se fonde.
Par Antithese.
Qui est le poure, & malheureux au monde?
C'est l'homme auare, & qui est aux biens se fonde.
Diues siquidem est, nõ qui multa polCeluy est ri[-]
sidet, sed qui sua sorte contentus est: a-
auarus autem omnis pauper est, qui
[p. 13]De Bias
13
quod habet, non habet.
che, non pas qui a beaucoup de biens,
mais qui se contente: tout hõme auari-
cieux est poure, qui n'a pas ce qu'il a:
c'est a dire q ne l'ẽ ose, n'y peult seruir.
4
Que dos matronæ pulcherrima? vita pudica.
puella indotata, satis dotata, si casta.
Qui est le plus douaire vnique
De la femme? vie pudique.
5
Que casta est? de qua mentiri fama veretur.
Laquelle doit estre chaste nommee?
Celle dont craint mentir la renommee.
Thucidides eam optimam definit vxo[-]
rem, de cuius laude velignominia mi-
nimus rumor habetur.
6
Quod prudentis opus? cum poßit, nolle nocere:
Quod stulti proprium? non posse, & velle nocere.
A quoy se peult demontrer l'homme sage?
Quand il peult nuire, & n'en a le courage:
[p. 14]
Et l'homme fol? quand de grand cœur desire
Nuire a autruy, alors qu'il ne peult nuire.
Autrement.
Quel est le faict d'homme prudent?
Pouoir, & ne vouloir meffaire:
Quel est le faict de l'imprudet?
Vouloir, & ne le pouoir faire.
Sentences de Pittacus
Vers Iambiques
trimetres.
1
LOQVI ignorabit, qui tacere nesciet.
A peine onques bien parlera
Qui bien taire ne se saura.
Autrement.
Bien parler ne saura
Qui taire ne pourra.
Eiusdem etenim artis esse videtur, re-Il semble
ctè loqui, & rectè racere.
que bien parler, & bien se taire, appar-
tienne a vn mesme art ou science.
[p. 15]

temps & lieu, tellemẽt que les propos
ne soient point friuolement iettez.
2
Bono probari malo, qum multis malis.
Non refert quàm multi laudent teIl ne fault pas aduiser cõ[-]
sed quales: nam ab improbis laudari,
tuperari est.
bien de gẽs, mais quelles gens te louẽt
car la louãge des méchãs, c'est blasme.
D'vn seul homme de bien
Estre estimé vault mieux,
Qu'auoi loz en maintz lieux
Des gens ne valans rien.
Autrement, en Vers Alexandrins.
Auoir loz i'ayme mieux, & trop meilleur me semble,
D'un seul homme de bien, que des méchans ensemble.
3
Demens superbis inuidet felicibus.
Stultitiæ est, cruciari felicitate malo-C'est grande folie d'ester fa-
rum, quasi in vulgaribus bonis sita sit
[p. 16]De Pittacus. 16
felicitas.
ché de la prosperité des méchans, cõme
si la felicité cõsistoit aux biẽs mõdains.
Dessus les riches somptueux
N'est enuieux le vertueux.
Autrement.
Le fol est enuieux
Des riches glorieux.
4
Demens dolorem ridet infelicium.
Stultum est, gaudere calamitate ma-c'est sottemẽt fait de se resiouyr du
lorum, quasi non & ante fuerint infeli[-]
ces:
malheur des méchans, comme s'ilz ne[-]
stoiẽt pas desia assez malheureux, pour
leur méchanceté.
Le fol pareillement
Rit de l'homme en tourment.
5
Pareto legi, quisquis legem sanxeris.
Quod alijs prescripseris, ipse seruato:
Fay [p. 17]

La reigle qu'as trouuee
Soit par toy obseruee.
Autrement.
Obserue la Loy
Mise sus par toy.
Soit pour exemple le faict de Zalen-
cus , & de T. Manl. Torquatus.
6
Plureis amicos, re secunda compares:
Paucos amicos, rebus aduersis probes.
Force amis trouueras
En ta prosperité:
Mais en aduersité
Peu en éprouueras.
Sentences de Cléobule,
en Vers
Asclepiades.
1
Quanto plus liceat, tam libeat minus.
Plus sur le peuple as de puissance
Tant moins a le greuer t'auance.
B [p. 18]

2
Fortunæ inuidia est, immeritus miser.
Cùm bonis malè est, fortunæ impu-
tatur, cùm ea sæpe magnatũ sit culpa:
Quãd les bõs ont mal, on l'attribue
à Fortune, iaçoit que bien souuẽt c'est
la faute des plus grans.
L'homme qui sans merite endure,
Fait blasmer la fortune dure.
Autrement.
C'est malignité de Fortune
Qui les gens de bien infortune.
3
Felix criminibus nullus erit diu.
De bonis malè acquisitis (vt aiunt)Des
non gaudebit tertius hæres.
biens mal acquis le tiers heritier (com[-]
me l[']on dit) n'en iouyra point.
Qui bien par mal aura,
Long temps n'en iouyra
. Cato in hanc sententiam
[p. 19]

Indulget fortuna malis, vt lædere poßit.
4
Ignoscas alijs multa, nihil tibi.
In alios lenis esto, in te seuerus:Sois
iuge rigoureux à toy mesme, mais gra[-]
cieux et misericors aux autres.
Beaucop aux autres tu doibs bien,
Mais à toy ne pardonner rien.
Autrement.
En plusieurs cas autruy excuse:
Mais pour toy ne prens nulle excuse.
5
Quiconque pardonne aux bons,Parcit quisque bonis, perdere vult malos.
veult perdre les méchans: ou bien cha[-]
cun de bon cœur pardonne aux bons
si par fois ilz ont mespris: mais nõ pas
aux méchans obstinez.
Quiconque aux bons vient pardonner,
Ruine aux méchans veult donner.
Autrement.
B ij [p. 20]

Chacun aux bons, de cœur pardonne:
Mais aux méchans, la peine ordonne.
A ce propos dit tresbien Publian,
Bonis nocet, quisquis pepercerit malis.
C'est a dire, Quiconque pardon-
ne aux méchans, il nuit aux bons: car
moins de gens de bien y aura, si les mé[-]
chans ne sont point punis, comme s'il
estoit loisible et permis d'estre méchãt
Omnes sumus licentia, & impuni-Licẽce, & impunité rend les gẽs
tate.
tousiours pires, pource est bon de re-
prẽdre, corriger, & chastier tousiours
en temps, & en lieu, auec moderation
toutesfois.
6
La vertu de noz ancestres, ne nousMaiorum meritis gloria non datur:
Turpis sæpe datur fama minoribus.
Laus parentum non tribuitur posteris:
At probra parentum facilè obijciuntur liberis.
est attribuee: mais leur deshonneur
[p. 21]

nous est incontinent reproché.
Des maieurs les honneurs
Ne nous sont point donnez:
Mais tost les deshonneurs
Nous sont plaquez au nez.
Autrement.
Des ancestres l'honneur
Est peu prisé du monde:
Souuent leur deshonneur
Aux successeurs redonde.
Chilonis, carmine Choriambico,
ex Choriambis tribus,
& Amphibra
cõuidetur fotadicum carmen.
Sentences du sage Chilo, en vers
Choriambique, ou Sotadique
1
NOLO minor me timeat, despiciát que maior:
Ie ne veux point estre craint des petis:
Außi des grands ne veux estre en mespris.
Autrement.
Ie ne veux point estre en mespris des grans,
Ny estre craint außi des basses gens.
B iij [p. 22]

Ie ne sois craint de mon inferieur,
Ny mesprisé de mon superieur.
2
Viue memor mortis, ne sis immemor & salutis.
Aliàs item Viue memor salutis.Fuy les choses vilaines,
Sic fuge turpia, quasi hodie mori-
turus: sic cura honesta studia, quasi sem[-]
per victurus.
comme prest a mourir, exerce les cho[-]
ses honnestes, comme si tu deuois tous-
iours viure.
Souuienne toy de la mort en viuant:
Quant a vertu n'oublie aller auant.
Autrement.
Et ton salut sois tousiours poursuiuant.
3
Tristia cuncta exuperans aut animo, aut amico.
In rebus aduersis, aut amici consue-En aduersité passe ta melanco-
tudine falle mœrorem, aut animo te su[-]
stine.
[p. 23]

lie auec ton ami: ou bien endure la, &
la supporte de grand cœur.
Vn bon ami, ou bien le tien grand cœur,
De tous tes maux te font maistre, & vainqueur.
4
Tu bene si quid facias, non meminisse fas est.
Beneficia tua in alios collata, prædi-
cent alij.
Vantance ne me fais
Des biens que tu as faicts.
Autrement.
Ne me presche, en effect,
Le bien que tu as fait.
Aucuns aioutent encores cetuy vers.
Idem dicit Cato, his versiculis, libre.1. Autant en dit Caton par ces vers.Quæ benefacta accipias, perpetuò memento.
que i'ay ain[-]Officium alterius, multis narrare memento:
Atque alijs cùm tu benefeceris ipse sileto:
si traduits.
Si l[']on t'a fait ou plaisir, ou bienfaict,
Tu le dois bien a plusieurs raconter:
B iiij [p. 24]
Mais le plaisir qu'aux autres auras fait,
Tu le dois taire, & non pas le conter.
5
Grata senectus homini, quæ parilis iuuentæ.
Florida sectus, similis est adole-Vieillesse allaigre, est sembla-
scentiæ:
ble à ieunesse.
Plaisante est la vieillesse
Qui resemble à ieunesse.
6
Par Antithese du precedent.
Morosa iuuentus, similis est senectuti.Illa iuuentus grauior, quæ similis senectæ.
Chetiue est la ieunesse
Qui resemble a vieillesse.
Solonis carmine Trochaïco,
Sentences du sage
Solon, en
Vers Trochaïque.
1
DICO tunc beatam vita factatum peracta sunt.
Id est, Nemo beatus, nisi quiNul n'est eu-
[p. 25]De Solon. 25
feliciter obijt diem:
reux, que celuy qui est bien mort.
La vie eureuse ne se nomme
Sinon apres la mort de l'homme.
Ouid. in lib. Metamorphoseos,
Le riche Roy Cresus pensant le con[-]Dicique beatus
Ante obitum nemo, supremáque funera debet.
traire, & ne croyant au sage Solon, l'é[-]
prouua bien, estant prisonnier de Cy-
rus , & en tresgrand & eminant dan-
ger de cruelle mort, tesmoing Hero-
dote l'historiographe.
2
Par pari iugato coniunx, dißudet quod impar est.
Qui de marier s'appareille,
Il doit bien prendre sa pareille,
Ce qui n'est pareil, ou egal,
C'est sans propos, & conuient mal.
Le semblable dit Deianyre en son
epitre a son mari Hercules.
[p. 26]

Si qua voles aptè nubere, nube pari.
Femme qui te veux marier,
A pareil dois t'apparier.
3
Non erunt honores vnquam fortuiti muneris.
Honos verus, virtutis est præmium,Le vray hõneur
non fortunæ munus.
est le salaire, & le bien de la vertu, &
non de la fortune.
Les vrays honneurs, en sorte aucune
Ne sont les dons de la fortune.
Autrement.
Le vray honneur qui tousiours dure
N'aduient point par cas d'auenture.
Autrement.
Le vray honneur & pardurable
Ne tient de fortune muable.
4
Clam coarguas propinquum, sed palam laudaueris.
Amicum laudato palam, sed erran-
tem, occultè corripe.
Repren l'ami secretement,
Et le louë publiquement.

5
Pulchrius multò parari, quàm creari nobilem.
Clarior est nobilitas quam ipse tuis
virtutibus pararis, quàm quæ tibi ex
maiorum imaginibus contigit.
Noble par vertu, & vaillance,
Est plus noble que de naissance.
A ce prepos conuient bien la response
que feit Cicero a son ennemy, qui par
derision l'appelloit, homme nouueau,
& non noble.
6
Si fatum vitari nõ potest, quid pro[-]Certa si decreta sors est, quid cauere proderit?
Siue sunt incerta cuncta, quid timere conuenit?
dest præscisse, & cauisse, sin incertum,
stultum est timere quod, an euenturũ
sot, nescias: dilẽma est, seu complexio,
argumenti genus in Astrologiæ ni-
mimum studiosos, ac superstitiosiores,
[p. 28]

quàm par sit obseruatores rerum hu-
manum.
Si la destinee nous meine,
Que sert d'y cuider resister?
Mais c'est fortune incertaine,
Que sert craindre, & s'en contrister?
Sic Lucinius è Græco in hanc sen-
tentiam.
Thomas Morus.Si ducunt te fata, feras, dolor additur omni
Inuito, & collo non minus illa trahunt.
Cato in hanc sentitiam.Si ferris, ferre, & fer: sin irasceris, & te
Læferis, & quod fert te feret, atquet trahet.
Traduction.Quid Deus intendat noli perquirere sorte:
Quod statuit de te, sine te deliberat ipse.
Ce que de toy Dieu voudra ordonne
N'enquiers par sort, & tel soing ne te donne:
Que veult il faire? ou bien, ou mal donner?
De toy sans toy il dispose, & ordonne.
Thaletis, carmine Pentametro.
[p. 29]
De Thales
29
Les sentences de Thales; bien que le
vieil exemplaire les attribue
à Anacharsis.
1
TVRPE quid ausurus, te sine teste time.
Quod apud alium puderetfaisant mal
facere, nesolus quidem ausis
facere, veluti teipso teste:
encores que tu sois seul, crains le tes-
moignage de toy, non moins que ce-
luy d'autruy.
Bien que sois de toutes gens loing,
Crains toy toymesme sans tesmoing.
2
Vita perit, mortis gloria non moritur.
Etiam post mortem viuit gloria beneLa vie perit par mort, mais
factotum:
l'hõneur et renom des actes vertueux,
mesmes en la mort, ne perit point.
[p. 30]

La vie en brief sa fin aura:
L'honneur par mort point ne mourra.
A ce propos dit vn autre Poete.
C'est a dire, Pense que c'est vn grãdSummum crede nefas animam præferre pudori:
Et propter vitam, viuendi perdere causam.
mal, que d'estimer la vie plus que l'hõ[-]
neur: & pour la vie perre la cause de
viure.
3
Quod facturus eris, dicere sustuleris.
Retice quod est in animo facere, neTien secret ce que tu
quis te impediat.
veux faire, à ce que quelcũn ne t'y nuise
Ne déclare point ton affaire
Qu'on ne t'empesche de la faire.
Autrement.
Ne veuille dire, ains tousiours taire.
Ce que tu entreprens de faire.
4
C'est quasi le semblable que cy dessusCrux est, si metuas, vincere quod nequeas.
[p. 31]

Faxis vt libeat quod est necesse.
Auget sibi molestiã qui timet quodCeluy augmẽte bien
vitari nõ potest.
sõ mal, qui craint ce qu'il ne peut fuyr.
C'est grand mal de se tourmenter
De ce qu'on ne peult euiter.
Autrement.
Grand mal tu sens, si tu te deulx
De ce que fuyr tu ne peux.
5
Prestat verè cari ab inimico, quàmCùm verè obiurgas, sic, inimice, iuuas.
falsò laudari ab amico.
Ennemi, qui bien me reprens,
Tu me profites, & m'aprens.
L[']on attribue aussi cetteci a Thales.
Cum falsò laudas, sic & amice noces.
Ami, tu me portes nuisance,
Quand me louer a tort, t'auance.
6
Nil nimium satis est, ne sit & hoc nimium.
Ne quid nimis: nam modus in omniIl ne faut rien
[p. 32]bus rebus est optimus.
trop: car moyen en toutes choses est
tresbon.
Iamais nul trop ne fut la suffisance,
Que ce ne soit suffisance vne outrance.
Autrement.
Le trop n'est pas moyen, ne suffisance,
Que suffisance außi ne soit outrance.
Autrement.
Le trop n'est suffisance,
Mais le trop est outrance.
DE SEPTEM SAPIEN-
tibus, versus septem, ex
Græco,
per Ausonium: singulisuum
habent
versum.
Præfatur his duobus Ausonius.
Septenis patriam sapientum, nomina, voces,
Versibus expediam, sua quemque monostica dicent.

Chilo Lacedemonius 1.
Chilo, cui patria est Lacedemon, noscere seipsum.
Periander Corynthius 2.
Periander, trepidam moderare, Corynhius, iram.
Pittacus Mitylenæus. 3.
Et Mitylanæis, nimum nil, Pittacus oris.
Cleobulus Lyndius 4.
Mensuram optimum ait, Cleobulus Lyndius, in re.
Solon Attheniensis. 5.
Expectare Solon finem docet, ortus Athenis.
Bias Prienæus. 6.
Plureis esse Bias prauos, quem clara Priene.
Thales Milesus. 7.
Mileti fugisse Thales vadimonia alumnus.

Epigramme
A TRESILLVSTRE,
& Tresflorissant Prince Mon-
seigneur le Duc d'Aniou,
quatriéme filz
du Roy.
Charles Fontaine, S.
Durant cette eureuse ieunesse
Pourra bien prendre esbatement
Votre vertueuse noblesse
Auec ma Muse honnestement:
5Car elle chante chastement
Au loz de Vertu immortelle:
Et si mesprise constamment
Maintz abus de vie mortelle.

LES DIX COMMAN-
demens de la Loy de Dieu
donnee
à Moise, escrite es eux Tables, mis
en
vers François, pour instruction
aux enfans, & pour les mieux rete-
nir en memoire.
Le premier Commandement.
PREMIEREMENT en tout temps &
tout lieu
De tout ton cœur il te faut aymer Dieu.
Le Second.
En nulle sorte idoles ne feras,
Et s'il s'en fait, ne les adoreras:
Car ton Dieu suis (dit le tresgrand Seigneur)
Qu'adorer doibs par souuerain honneur.
Le tiers.
Ne iure Dieu en vain, ny pour debat.
Le quart.
Soleniser faut le iour du Sabbat
C ij [p. 36]
Les quatre susditz Commandemẽs
estoient escriptz du doigt de Dieu
en
la premier table de pierre, & appar-
tiennent a l'honneur de Dieu.
Sensuyuent les six qui estoiẽt escriptz
en la seconde table, &
appartiennent
a l'honneur & charité que nous de-
uons enuers noz parens, & enuers
vn chacun.
Le cinquiéme.
Tu dois honneur a ton pere & ta mere,
Pour en la terre auoir vie prospere.
Le sixiéme.
Homme ne tue, ou de cœur ou de faict.
Le septiéme.
Ne sois paillard, ny adultere infect.
Le huitiéme.
Ne tollis point, ny permetz qu'on desrobe.
[p. 37]
De ton prochain ou l'argent ou la robe.
Le neufiéme.
N'aye iamais vn si lasche courage
Que sur autruy porter faulx tesmoignage.
Le dixiéme, & dernier commande-
ment de
la Loy appellee pour-
ce, le Decalogue.
Aux biens d'autruy ne porte aucune enuie,
Dont il se sert, & entretient sa vie:
Soit sa maison, sa femme, ou son seruant,
Ains comem toy doibs aymer tout viuant.
Sainct Paul reduict ces dix commã[-]
demẽs en deux, a sçauior,
aymer Dieu
sur toute chose, & son prochain com-
me soymesme, disant qu'en iceulx est
sommairement
contenu, & accompli,
tout ce que la Loy & les
Prophetes
ont dit.
S'ensuit le Benedicite, & graces,
pour les enfans.
Ciij
[p. 38]

DEs biens que dieu trescharitable
Prenons le repas profitable:
De ce qu'il nous donne auiourd'huy
Louer le fault, tout vient de luy.
5
Au nom du Pere & du Filz, & du saint Esprit. Amen.
Graces.
AV Roy celeste, Roy diuin
Qui nous donne viande & vin
Par sa grande bontê notoire
Soit a tousiours honneur & gloire.
Autres Graces
AV Roy des cieulx inuisible, immortel,
Seul Dieu regnant, qui notre corps mortel
Repaist des biens de sa grande largesse
Nous rendons grace, & tout honneur sans cesse.
Oraison a dire le matin, quan
on se leue.
PERe eternel, qui m'as gardé la nuict
De mort soubdaine, & de songe qui nuit,
Ie te suppli preserue moy ce iour,
Fay en mon cœur spirituel seiour:
5Ce iour? que di-ie? helas mais i'ay enuie
Que tu sois mien tout le temps de ma vie:
[p. 39]
Que tu sois mien? i'entends que ie sois tien
Ainsi que i'ay desir que tu sois mien:
Car, o vray Dieu de qui depend mon estre,
10Ie croy que tien sans toy ie ne puis estre:
En toy ie suis, ie parle, & ie chemine?
En toy ie vis, & moy ie define:
En toy, par toy viuant suis, & seray,
Et apres mort en toy ie reuiuray.
Oraison a dire quand on
se va coucher.
PEre eternel qui iour & nuict ordonnes
L'un fuyuant l'autre, a sçauoir le iour donnes
Pour labourer, trauailler & veiller,
Et puis apres la nuict pour sommeiller,
5Et repos prendre apres trauail du iour,
Ie te supply prendre en gré omn labour,
Et mon trauail que ce iourd'huy i'ay fait,
En pardonnant mon deffault & meffect.
Puis ie te pry, mon dieu, fay moy la grace
10Que cette nuict vn bon repos ie face,
Si que demain mieulx trauaille & opere:
Fay moy ce bien, ie t'en requier, o pere.

S[']ENSVIVENT PLV-
sieurs
Odes pour la vertu,
Que le repos, & contentement d'es-
prit, est le seul grand bien que
Dieu
donne en ce
monde.
A ses deux filz, Ian &
Charles Fontaine.
Ode premiere
QVand nous viuõs si peu de temps
Cõme quarante ou cinquante ans
Nous deuons (si nous sommes sages)
Ne craindre ces mortels passages:
5
Puis n'esperer rien de trop grand,
Qui l'homme hors de repos rend:
Nous viuons vne fois au monde:
Ici n'auons vie seconde.
[p. 41]

Puis que ne viuons qu'une fois,
10Ny les Papes, Empereurs, Roys,
Viuons donc la vie prospere,
Et plus exempte de misere:
A toute heure nous asseurans
Contre ces grands puissans tyrans,
15Orgueil, Euie, & Auarice
Ire, & volupté, faulse lice.
Tous les tormens des grans Tyrans
Ne sont si aigres, ne si grans
Ny lisle en ses tourmens fertile
20Aux antiques Tyrans seruile.
Les grans labeurs d'Alcide fort
N'eurent tel sort, ny tel effort,
Ne furent onc si fort penibles
Que ces maulditz mõstres horribles.
C v [p. 42]

Mes enfans fuyez les de loing,
Et appellez Dieu au besoing:
Mes enfans bouchez vos oreilles
A ces Seraines nompareilles
Ces Voluptez, ces appetis,
30Qui corrompent grans & petis
Ces faucetez, & ces faintises,
Concupiscences, couuoitises.
Ce sõnt les grãs bourreaux des cœurs
Ce sont les grands mõstres vainqueurs
35De la plus part des miserables
Gens mal fondez & variables.
Mais cil qui a l'esprit fondé
Sur fondement ferme & fondé
Par vertu ferme, & asseuree,
40Vit mieux, & plus à la duree.
[p. 43]

Maints en voyons en grans tresors
Mais nuls Priams & nuls Nestors
Car trop est briéue notre vie,
Dessus la leur portant enuie.
45
Diogenes en rien confus
En l'autre monde veit Cresus
Cresus riche Roy de Lydie
(C'est chose digne que ie die)
Incontinent donc l'aborda,
50Le salua, luy demanda
S'il auoit ses biens & richesses,
Ses grandes pompes & liesses:
Cresus dit, ie n'ay du tout riens:
Mais moy (dit l'autre) i'ay mes biens,
55Vertu, contentement & ioye,
Comme en l'autre monde i'auoye.
[p. 44]
Nuds nous venons, nuds nous allõs,
Et la mort nue a noz talons
Nous suit, nous menace & nous presse
60Insque qu'en la fosse nous laisse.
Or, quand tout sera bien compté,
Au regard de l'eternité
Noz iours ne sont qu'une iournee
A toute creature nee.
65
En naissant quasi nous mourons,
Et en mourant nous ne saurons
Que deuiendra richesse aymee,
Qui tost se transmue en fumee.
C'est le plus fort que nous voyons
70D'œil & d'esprit (ou que soyons)
A suyure vertu & science,
Armez de bonne conscience.
[p. 45]

La vertu est le premier point:
Le second la suit bien a point,
75C'est bon eur, bonne renommee
Que grand' labeur aura semee:
Semee ore aux bouches des gens
Semee aux cœurs intelligens:
Semee aussi en maint beau liure
80Qui mieux nous fait viure & reuiure.
Mes enfans qui voyez mon nom
Auoir acquis quelque renom,
Ie prie au grand Dieu qu'il vous face
Enuyure la meilleure trace

A SON AMY QUI LE
preschoit de vacquer aux biens
&
honneurs de ce
monde.
Ode Seconde.
Ma muse point ne s'amuse,
Ny s'abuse
A ces iouetz de fortune:
A ces biens qui aueuglissent
5Et perissent
Plus muables que la Lune.
Sur la grand mer fluctuante
Ondoyante
Ne puis asseurer ma barque:
10Mais sur petite riuire
Et non fiere
Tout doucement ie m'embarque.
[p. 47]

Vers la grand dame aueuglee,
Desreiglee
15Qui sa roue tourne & vire
Mes pas & vœux ie n'adresse,
Ains les dresse
Vers l'autre Dame ou i'aspire
Sur vn roseau ie n'appuye
20Moy, ma vie,
Mon ame, & mon asseurance:
Ny sur branche morte & seche
Ma flammeche
Se nourrit en esperance.
25
Ie ne puis aymer cette huile
Noire & vile
Qui les plus terrestres tache:
Et dont la tache vilaine
Croist mal saine
30A tout esprit qu'elle entache.
[p. 48]

Dessus la mer au riuage
L'homme sage
Ne bastit son edifice:
Mais sur pierre ferme & seure
35Il asseure
Trop mieux sa maison propice.
De la terre les entrailles
Minerailles
Ne sont l'obiect de ma veuë:
40Les estoiles mieulx luisantes
Plus plaisantes
Sont a l'ame non pollue.
O amy, ces deux ensemble
Ce me semble
45L'œil ne contemple & auise:
L'œ qui pur le ciel contemple
Hault & ample,
Au fonds de terre ne vise.
De [p. 49]

De la froide Charité, & de la bonne
amitié perdue.
Ode 3.
SI le grand sainct nom d'amitié
Fust si grand & sainct cõme on dit,
L['] on ne trouueroit la moitié
Des poures gens, & sans credit:
5
Aux indigens il faut prester,
Dit Dieu, non pas aux riches gens:
Mais nul ne se veult arrester
Ny a Dieu, ny aux indigens.
Prestre au poure, ie le rendray,
10Ce dit Dieu, quand luy presteras:
Mais le riche dit, non feray,
Ces propos ne sont que fatras:
D [p. 50]

Ie presteray a ceux qui ont
Bonnes maisons, bons Respondans:
15Quand mes derniers prestz ne seront,
Ie mettray les sergens dedans.
Ie ne preste que soubz espoir
De bien gaigner diligemment:
Ie n'ay le vouloir ny pouuoir
20D'attendre au iour du iugement.
Caton dit qu'aux gens incongnus
Mesme on doibt bien faire plaisir:
Tu ne fais bien à tes congnus,
Mais plus tost mal & desplaisir.
25
Tu te fies donc fol aux biens,
Biens non biẽs, du monde trompeur:
Et ne crains d'entrer aux liens
Du grand diable auare & pipeur:
[p. 51]

Mais ce monde tost passera,
30Et ceux qui se fondent en luy:
Et l'autre a tousiours durera
En grande ioye ou grand ennuy.
Aux amis du monde.
Ode 4.
NOus viuons, & faisons ainsi
Que si nous deuions viure ici
Dix mil ans, tetans l'auarice
Comme notre mere nourrice.
5
Plus on a, plus on veut auoir:
Et ne ne fait si bon deuoir
De craindre diuine iuistice
Que d'obeir a l'Auarice.
Nous viuõs & mourõs apres,
10Et l'embrassons de si trespres
Cete orde & malheureuse lice,
Que la vertu nous semble vice.
D ii [p. 52]

La ou est notre argent & or
Là mettons notre cœur encor:
15Brief notre idole est l'Auarice,
Et l'vsure, sa sœur complice:
Mais ne pouuons seruir a deux,
Que ne deffaillons a l'un d'eulx:
Le ciel est pour l'esprit propice,
20La terre est du seul corps nourrice.
Nous mourons naturellement
A soixante ans communement,
Et faut il tant de peine prendre
Pour l'or qu'il faut laisser ou rendre.
25
Bias dit qu'il porte auec soy
Tout son bien: & ne prend émoy
D'aller tout vuide en autre terre
Quand sa ville est prise par guerre,
[p. 53]

Et l'autre dit: laisser nous faut
30A noz filz, le bien qui ne faut,
Qu'ilz porteront hors du naufrage
Sauf auec eux, pour bon partage.
Le ieune esprit bien reuétu
Et de science & de vertu,
35Ne la peut perdre: & si la donne
Aisément a toute personne.
C'est le contraire de ce bien
Que nous disons bien terrien:
Car ne pouõs souffrir qu[']il sorte,
40Et si se perd en mainte sorte.
Mais biẽ souuẽt pdre nous fait
La santé, l'honneur & la vie
Quãd trop vilemẽt pour sõ fait
Notre ame se rend asseruie.
D iii [p. 54]

Midas s'en va mourant de faim,
Cõbien qu'il soit de grans biens plein:
Et si est moqué a merueilles,
Ayant comem asne, grans oreilles.
Tantalus ne mange & ne boit,
50Bien que pres de sa bouche il voit
D'un beau fleuue les eaus coulantes:
Et pommes en l'arbre pendantes.
Les Poetes ont dit ceci,
Et l'ont écrit, ou faint ainsi,
55Pour abhorrir l'auare lice,
Chiche, chetiue, & sans police.
Son chef mainte ville a haucé,
Qui l'a apres bien bas baissé,
Estant deuenue en ruine,
60(Par ce vice qui tout ruine)
[p. 55]

Depuis qu'auare cruauté
Y auoit son siege planté
Encontre la deesse Astree
Par grand vsure non chatree.
65
Vn Roy de France quelque fois,
(Roy exemple des autres Roys,
Vray Roy des autres Roys exemple)
La chatra, & chassa ensemble.
Ie sçay qu'aux lois faut obeir,
70Non les detracter ny trahir:
Mais (dit le Seigneur de nature)
Le corps est plus que la véture.
L'Egipte l'entendoit tresbien,
Comme appert par vn decret sien,
75Et recitè par Diodore,
Decret qui l'Egipte decore.

A celuy qui s'esbahissoit que l'au-
theur n'auoit acquis plus
de biens de
ce
monde.
Ode 5
AMI ne t'esbahi comment
I'Ay tant peu de biens en ce monde,
La raison, mon entendement,
Du tout ailleurs tousiours se fonde.
5
Puis que ie n'en prens le chemin,
Cesse donc a t'esbahir, cesse:
Car mon papier ou parchemin,
Ne prend point si bas son adresse
Comme celuy des aduocatz
10Greffiers & notaires publiques,
Qui n'entendent a autre cas
Qu'a leurs terriennes pratiques.
[p. 57]

Quant a moy, plus tost ie serois
Curius, Crates, ou Fabrice,
15Car pour l'honneur renoncerois
A tout auoir & auarice.
L'homme par vertu & scauoir
Tousiours plus honoré se trouue
Que qui autrement se fait voir:
20C'est vn vil cœur qui l'argent couue.
Plus qu'Abbaïe, ou Euesché,
I'ayme l'honneur du moindre liure
Que par escript i'auray couché
Qui apres mort me fera viure.
25
Plus que Conté ou que Duché
I'ayme ce beau chant de ma Muse,
Chant qui m'a pris & aleché
Tant que pour luy tout ie refuse.
D v [p. 58]

Vray honneur, richesse & vertu
30Prennent le chemin tout contraire:
Par grand' vertu penserois-tu
Grans bien mondains a toy attraire?
I'ay bien en mon entendement
Par le moyen de ma science,
35Vn plus parfaict contentement
Qui me nourrit en patience.
Que si ce n'estoient mes petis,
Attendans de moy la bechee,
Lairrois tous moyens iuentifz
40Par qui ma Muse est empechee.
Au General Imbert Faure.
Ode 6.
ENtre mille occupations
Le chant des Muses qu'on admire,
Entre douleurs & passions,
Sert de medecin, & bon Mire.
[p. 59]

Mais y a il loz plus certain,
Louanges plus cleres diffuses,
Que du cler chant doux & haultain
Des belles immortelles Muses?
Douze amis, douze blocs d'escus
10Raclans de leur extr'ordinaire
Feroient reuiure leurs vertus,
Ayants Poete debonnaire.
Cent escuz ilz ne plaindront pas
En menus plaisirs & delices:
15Qui feront apres leur trespas
Cent braues tesmoings de leurs vices.
Voyant les gens tant aueuglez,
Apres le vice allans si vite,
Si deprauez, si desreiglez,
20Souuent ie souhaite estre hermite.
[p. 60]

Moy pouret, aux gens de sçauoir
I'ay bien donné deux fois cent liures,
N'espargnant mon petit auoir,
Mon pouuoir, mes viures, mes liures.
25
A petit de frais s'entretient
Le Poete en sa douce veine:
Et rien d'auarice ne tient
Cil qui a le nom de Fontaine.
Vous m'auez souuent inuité,
30Me montrant bon œil & visage:
Ce faisans auez incité
Vers vous ma plume, & mõ courage.
Ie recongnois ce vouloir bon
Qui est graué en ma memoire,
35Et par ma Muse votre nom.
Se vengera de la mort noire.

A quelques siens pa-
rens & amis.
Odes 7.
VOus auez donc bien grand enuie
De me voir riche richement,
Et desir n'en eu de ma vie,
Pour le vous dire franchement.
5
I'ay eu du bien (ie le confesse)
I'ay eu du bien moyennement:
Par foys me fuyt, & ie le laisse,
Tant i'en ay peu de pensement.
Vne Diuinité m'emmeine,
10Et rauit mon esprit plus hault:
Si que ie n'ay loisir a peine
D'auiser l'or qui trop moins vault.
[p. 62]

Laissez moy bas en bien terrestre
Content suis peu de biens auoir,
15Seulement riche ie veux estre
En grand' vertu, & bon sauoir.
Vertu est du grand Dieu la fille,
Et iamais il ne la lairra,
Que doit chaloir de croix ne pille
20A qui Dieu, & sa fille aura?
En la grande maladie
de sa Flora
Ode 8.
DIeu tout puissãt & tout voyãt aussi
Si ton doux œil aduise le soucy
De cil qui fait en toute sa souffrance
De ta bonté son bouclier & deffense,
[p. 63]

S'il est ainsi (tu scez bien si ie mẽtz)
S'il est ainsi qu'ẽ tous mes troublemẽs
(Dõt le dur laz a peu pres me suffoq)
I'ay tõ sainct nõ inuoqué, & inuoque.
S'il est ainsi qu'a tous mes ennemis
10Ie ne veux mal, nõ plus qu'a mes amis,
Et que iamais ne leur ay fait nuisance,
Bien que parfois i'en euz quelque pui[-]
sance.
Si les plaisirs, ou quelqs biẽs dõnez
I'ay bien cheris, louez, & guerdõnez,
15Ou soit de faict, ou de cœur volõtaire,
Sans les vouloir onc abaisser, ny taire.
Si les maings qu'a regret ie n'ay veuz,
Et n'ay dressé qu'a tout honneur mes
vœuz,

Si ie n'ay point de poison machinee,
20N'au fãg d[']autruy ma main cõtaminee,
Si ie n'ay point ambicieusement
Quis les honneurs, ny enuieusement
Ietté la dent de rapport ou diffame,
Pour nuire aux biens ou corps d'hom[-]
me ou de femme.
25
Si ie n'ay point par lâche volupté
Tendu les laz contre la chasteté,
Pour attirer par dõs ou par sornettes,
Le ieune cœur des simples pucelettes.
Si ie n'ay point dessoubs sainte amitié
30Ou mesmement dessoubs sainte pitié
Souillé l'hõneur des chastes mariages,
En parenté, ou bien hors parentages.
Si ie [p. 65]

Si ie n'ay point deshonneur pour-
chacé
A Nonne, ou veuue: ou autrement
chacé
Par flaterie, ou quelque ruse neuue,
Aux biens d'ami, de vieillard, ou de
veuue:
Si les gens d'aage, & gẽs d'autorité
I'ay reuerez par vne humilité:
Si i'ay porté honneur a pere & mere,
40Et cõmes moy, aymé & sœur, & frere:
Si ie ne veux m'ẽrichir p torts faitz,
Si ie n'ay point crocheté les buffetz,
Ny consellé a autruy de mal faire,
Ny retenu les gages, ou salaire:
45
Si ie n'ay point faulsé lettre, ou arrest,
E [p. 66]
Ny conseillé vsure, ou interest
(Comme auiourd'hui pour couuer-
ture ou
vse)
Ny abusé de quelque abus, ou ruse:
Si ie n'ay point friandé, gourmãdé,
50Le mien, l'autrui: ny quis, ou demandé
(Pour m'enrichir, ou viure a ma plai-
sance)
L'art d'alqmie, ou l'art de nicromãce.
Si ie n'ay point nulz impots inuentez,
Par q feroiẽt poures gens tourmẽtez:
55Si ie n'ay point du mal d[']autruy eu ioye:
Si ie n'ay point roigné or, ny mõnoye:
Si ie n'ay point esté ioueur, pipeur,
D[']argent d'autruy par fallace attrapeur,
Ny n'ay iuré en vain, ny par malice,
[p. 67]
Dieu, ou le diable (aux merchans gens
complices:)
Si ie n'ay point la main sanglãte mis
Par trahison sus nul de mes amis,
Si ie n'ay point esté trahitre a mon
prince
Ny n'ay foulé son nõ, ny sa prouince:
65
Si ie n'ay point les pupilles detruit,
Ny a faux coing forgé de iour de nuit,
Ny peruerty soubz tresorde luxure,
L'ordre & l'estat ordonné en nature:
Si ie n'ay point voulu plus que ne
puis
(Me contẽtant d'estre ce que ie suis)
Et n'ay cherché moyẽs deshonorables
Pour acquerir offices honorables:
E ij [p. 68]

Si le secret des amis i'ay celé,
Et ny par vin, ny par mal reuelé:
75Si ie n'ay point frappé hoste, ou ho-
stesse,
Ainsi deffẽdu quãd quelcũ les oppsse:
S'il est ainsi qu'aux amis, & parens
Coeur, corps, & biens i'ay faits tous
apparens,
Et que iamais n'ay caché a personne
80Ces petis biens que ta grace me dõne:
S'il est ainsi que tous dõs & biẽsfaits
Qui font en moy, ie di que les as faits,
Et tãt pl' est ta grace en moy notoire,
Tant plus aussi ie t'en rends grace, &
gloire:
85
S'il est ainsi qu'õcques ie n'ay doubté
[p. 69]
De ton essence, & de ta grant bonté,
Me refiant de laquelle, ie ploye,
Et de bon cœur pour mes prochains
m'employe:
S'il est ainsi qu'aussi ie doubte, &
crains.
L'ire de toy, qui fait dresser mes crins
Et q doubtãt iustemẽt peine, et corde,
Vois par appel, a ta misericorde:
Las, o mon Dieu, mon souuerain re-
cours,
Demontre moy qu'en toy gist mon
secours,
Gueri le corps lãguissant de ma flore,
Et gueriras mon foible esprit encore.
Fay moy hardi: ie di que tu le veux
E iij [p. 70]
Encor ie dy, & croy que tu le peux:
Quãd le vouloir est ioint a la puissãce,
100L'effect est prompt, l'effect est en pre-
sence:
La guerissant, les mains elle tendra
Vers ta hautesse, & honneur te rẽdra,
Mais quãt à moy, ie chãteray sãs cesse,
Pour ce bienfait, ta bonté, & hautesse.
Au Seigneur du Parq, Histo-
riographe du Roy.
Ode 9.
DEpuis que le sainct Ceste,
Me ioint a mon Alceste,
Plus libre ie me voy:
Chanteray-ie pas doncques
5La liberté qui onques
Ne fault en elle & moy?
Liberté vertueuse
Et non voluptueuse,
[p. 71]
(Dont la fin n'est qu'esmoy)
10
Ie la chanteray ores,
Et chanteray encores,
Car chanter ie la doy.
Macrin a la louange
De sa Gilon se range
15Et moy a ma Flora,
De qui la floriture
Ma muse en sa peinture
Par tout demontrera.
Ma Muse libre chante,
20Et Flora libre vante
Au sainct lien d'amour:
Duquel la ligature
Estroite, libre, & pure,
Nous lasse tout autour:
25
Et sans lasser nous lasse,
Relasse et entrelasse
En mille enlassans laz,
Car de telle enlassure,
Qui libres nous asseure,
30Iamais ne sommes las.

A sa Flora, & a ses deux Florons,
Iean & Charles Fontaine.
Ode 10.
De deux parties sommes faictz,
Sçauoir est le corps & l'esprit,
Et tous deux ont diuers effectz:
L'un quiert le bien qui ne perit:
5L'autre la terre va querant,
En laquelle en fin il pourrit.
L'homme d'esprit, du ciel parent,
Tousiours les nobles choses quiert,
Et puis aux autres les aprent:
10
L'honneur mondain point ne requiert:
Ny le bien, qui a plus de mal,
Par affection il n'acquiert.
L'homme corporel & brutal,
Combien qu'il soit beau, riche, & fort,
15Il est tout terestre metal:
Car sa pensee, son effort,
Toute sa fin, & tout son but,
C'est d'estre riche auant sa mort:
[p. 73]

Mais la couuoitise qu'il beut
20(Fiéure continue en son cours)
Onc rassasier ne le peut.
L'homme d'esprit, tout au rebours,
Par sa vertu & son sauoir,
A son contentement tousiours:
25
Iaçoit qu'il ait petit pouuoir
(Selon le mondain iugement)
Come vn souleil il se fait voir.
En luy n'y a nul changement,
Soit en richesse ou poureté
30Tousiours se maintient constamment:
Et en certain cours arrété
Onques n'en sera diuerti,
Non plus que Fabrice a été,
Qui ne print iamais le parti,
35Ny l'or & l'argent a foison,
Des mains des ennemis sorti:
Et l'autre en rustique maison
Aßis dessus vn banc de boys
Leur répondit par grand'raison:
40
Qu'il aymoit mieux cent mille foys
Des riches gens estre estimé
[p. 74]
Qu'auoir richesse: (o saincte voix!)
Ou est le Cretien renommé,
Qui die, & face ores ainsi
45Que ce payen tant bien limé?
Tout notre espoir, notre soucy
Ce sont les tripes & boyaux
De cette basse terre cy:
C'est l'or, l'argent, les beaux ioyaux,
50Qui s'enrouillent facilement,
Et font mille guerres & maux.
Celuy donc qui diuinement
La trace de l'esprit ensuit,
Vit trop plus honorablement:
55
Car la richesse qu'il poursuit
Ha bien vn autre fondement,
Et nulle ruine la suit,
Comme ferme eternellement.
A la Mort, que l'Auteur armé de
sa Pöesie va défiant.
Ode
11.
MOrt, vien sur moy quand tu voudras,
Pren moy au lict entre les draps,
[p. 75]
Ou aux champs, ou en mon etude,
Onc a ton honneur n'en viendras,
5Ie n'en ay grand' sollicitude.
Pour repoulser ton dur effort,
Mon vers est suffisant & fort.
Ie te presente, sans émoy,
Le combat: car ma Muse & moy
10Ferons reboucher ton dard rude:
Mon vers me vengera de toy,
Vers ennemi d'ingratitude.
Mon vers qui la mort picque & mord,
Fait trembler & mourir la mort.
A sa Flora.
Ode 12.
IE t'ay donné de ma richesse,
(Richesse qui point ne perit:)
Les beaux tresors de mon esprit,
Pleins de bon eur, et de ließe:
[p. 76]

Mais pense tu, o ma Florie,
Quand tu donrois cent mil ecus,
Que ie te donrois encor plus?
Somme d'argent est tost perie.
Cent mil ecus n'ont la duree
10de ce chant que ie vois chantant
Pour ta vertu que i'ayme tant,
Vertu non iamais mesuree.
Odelette à sa femme & a ses enfans
QVand Dieu ayme ta poureté
Qu'il veult bien poure au monde naistre,
Et aux biens ne s'est arreté
Viuant dedans ce val terrestre:
5
De peu auoir, peu ie me plaings,
Et peu me plaindray de ma vie:
Et sus ces rans riches tant pleins
Ie n'ay, & ie n'auray enuie.
Au Lecteur.
Si tu veux scauoir comment fut
Vn laid riche auare estimé,
Ly moy que l'honneur il receut
De Diogenes renommé.

Au Secretaire Iean Grauier.
Ici pourrez sauoir de moy
(Si ia ne le sauez) pourquoy
C'est que les serpens raieunissent,
Et que les hõmes tant vieillissent.
Ode 14.
LE serpent en terre ou en l'eau
Va despouillant sa vieille peau:
Et posant ainsi la vieillesse,
Il se retrouue en sa ieunesse:
5
Mais l'homme ne peut faire ainsi,
L'homme qui s'encombre en souci
Ne se raieunit iamais, certes,
Prenant la mort pour ses dessertes.
Les humains vn iour assemblez • Fiction
10Pour leur brieue vie troublez, • poetiq
Vous feirent en humbles manieres
A Iupiter tant de prieres,
Qu'il leur ottroya plus long cours,
Et de leur vie treslongs iours:
15Baillant ce don, fait en la sorte,
A vn asne qui le leur porte.
[p. 78]

Cet animal lourd & pesant
Eut soif, & sen alloit disant
A des serpens, laißez moy boire
20Dans ce lac plein d'eau trouble & noire.
Lors les serpens sages assez,
Respondirent, Si ne laissez
Ce don que portez, somme toute,
De notre eau n'aurez vne goutte.
25
L'asne leur baille a l'abandon
Ce don qu'il portoit, ce beau don:
Et en ce poitn, pour toutes sommes,
En sommes priuez, poures hõmes.
AD LAVDATISSIMAE
INDOLIS,
GENEROSIS-
SIMI
FRANCORUM REGIS Henrici II. quatuor
filios.
Martialis Cassagno.
REgia progenies tibi sit, Cassagno precatur,
Perpetuóque salus, perpetuóque decus.
[p. 79]
Terra iacét lentôque Arari circundata, & amni
Qui secum rapidas eiaculatur aquas:
5Hîc fons est, quem si sitibundo admoueris ori,
Nil opus Aonijs tingere pectus aquis.
Arthurus Pollux
Neruius.
Faultes aduuenues en l'impression.
Pag. 20 ligne 10. lisez
Omnes sumus deteriores
licentia,
Pag.22. ligne 4 lisez
Viue memor & salutis.
Pag.24. ligne 17 lisez fata, au lieu de facta.
Pag.38 ligne premiere
lisez, de, pour, que.
A LYON,
1558.