AV ROY, A LA LOVAN-
ge de la trefue, & pour la
poursuite de la Paix.
Puis que ce Roy en
grandeur admirable
Tenant en main Fortune fauorable,
Et adoré comme un Soleil leuant
(Soleil soulas de tout homme viuant)
Puis que ce Roy, grand
Roy de la grand’ France,
Grand de renom, mais plus grand de
puissance,
Veut rappeller
l’Astree, & l’embrasser,
Et à ces fins ha fait desia passer
La belle Trefue en son char
apparente,
Tiré d’espoir, portant table
d’attente
Par toute
France, & Martial
Piémont,
Son peuple à ioye & repos il
semond:
Peuple esperant qu’apres la
messagere
Dieu nous donra la iouïssance
entiere
De la grand’ Dame heureuse &
trionfante,
Qui tous grans biens seule en ce Monde
enfante.
Au
62
EPIGRAMMES.
Au
Roy.
Roy, fils de ce grand Roy de France,
Roy grand de nom & de puissance,
Pourroit ta petite
Fontaine
Te donner suffisante etreine,
Quand te donroit plus que soymesme?
Ie di que non: mais, Roy supreme,
Mais ta largesse trouueroit,
Trop mieux dequoy m’estreneroit.
Aus tresillustres
Princes & Princesses de
France.
Si mes dons & petis presens,
Que vous voyez ici presens,
Se presenter pour vos etreines,
Ne sont point d’etoffes hauteines
Ornez, enrichis, phalerez,
Diaprez, dorez, colorez:
Les Dieux reçoiuent des offrans
Les dons autant petis que grans:
Et par fois ont plus agreables
Les offrandes moins ostentables,
Venans d’un cœur deuot & dous.
Außi d’un poure homme à genous
Vn grand Prince
reçut de l’eau,
De l’eau, pour present bien
nouueau,
De
EPIGRAMMES.
63
De l’eau qu’il porteit en sa main,
Tant fut ce noble Prince humain:
Et l’eau du donneur n’estoit
sienne.
Receuez donques cette eau mienne,
Eau de ma fonteine Francique,
Ressentant de la Thessalique,
Et presentee par la Muse
Qui chanter vos noms ne refuse:
Mais qu’außi vous ne refusez
Luy changer ses habits usez.
Encores ausdits
Princes
&
Princesses.
Si vos grans vertus honorees
Ie n’ay bien au vif remirees
De mes yeux non assez agus,
Außi ne suis-ie pas
Argus
Ie ne suis Argus
Courtisan,
Mais de cœur votre partisan.
A la nation
Françoise.
I’escri en François doucement,
Qui en Latin pouuois escrire
Plus amplement & doctement,
Leur
64
EPIGRAMMES.
Leur langue est plus ample à vray
dire:
La notre honorer ie desire
Comme ont fait les Latins la leur:
Leur nation n’est plus en fleur,
La notre s’en va florissant,
Et croist auec ce grand Croissant
Que nous produist le grand
François,
(C’est mon double Astre ou que ie
sois,
Et quelque part qu’il vienne ou
voise.)
Mais ne somme nous pas François?
Notre langue est-ell’ pas
Françoise?
Encore à ladite Nation.
O forts François,
nation belliqueuse,
Que dites vous? le cœur vous croist il
point?
Quand la Fortune, estant victorieuse,
Vous rid si bien? ou (parlant mieux à
point)
Quand le Ciel mesme est vostre de tout
point?
C’est celuy seul qui au droit donne
force,
Et qui les Francs & leur fort droit
renforce:
C’est luy qui or’ ce Croissant
fauorise,
Contre lequel trop vainement
s’efforce
L’Aigle qui ha Plus
outre en sa deuise.
Au
EPIGRAMMES
65
Au
Roy.
Roy, qui n’as pareil
que ton Pere,
Du cler Phebus amy
prospere,
Fay que ma Muse droite & iuste
Te chante Mecenas
Auguste:
Fay que ie chante que tu n’as
Rien moins
d’Auguste &
Mecenas.
Au
Princes & Princesses de
France
& autres ses bons
Seigneurs
& amis.
Bien que la mesnagere mouche
N’ait fait son miel dedens ma bouche
Ainsi qu’elle fit, ce dit on,
A ce ieune diuin
Platon:
Mesme ce nonostant encore
Que, comme au bers de
Stesicore
Le Roy des
Chantres n’ait couché
Roßignolé, chanté, niché,
En mon berceau des mon enfance,
(Signe d’eloquente abondance)
Et que mon precepteur n’ait veu
Qu’il ait un blanc Cigne receu
Quand son disciple ie fus fait
Pour tendre à un art parfait:
E
Chacnn
Chacun
66
EPIGRAMMES
Chacun de vous pourtant soit seur,
Que ma Muse n’est sans douceur,
Et que la vertu honoree
Sera par mes Vers decoree:
Si ce n’est bien eloquemment,
A tout le moins disertement
A eux encores.
Si ma Muse ha, comme ie sens,
puissance,
De viure, & voir longue
postérité,
Vous en aurez la mesme iouissance,
Par votre Nom sur mes ailes porté.
A
Ioachin du Bellay,
Pierre de
Ronsard,
Estienne Iodelle,
Baïf &
Oliuier de Maigni,
Poëtes.
Les vers Latins i’ay delaissez
Pour escrire en nos vers François,
Ou la Muse vous ha poussez.
C’estoit c’estoit aux temps passez,
Parauant ce grand Roy
François
Qu’on brouilloit tout en Latinois.
A Mon
EPIGRAMMES.
67
A
Monsieur de Cheuriere.
Aller ne veux auant n’arrire,
Sans orner le nom de
Cheuriere,
Nom de soy mesme bien orné:
Cheuriere est en
toute maniere
A vertu & proesse né.
A
Monsieur de Pollienay.
Ton nom de ma Muse connu,
Ici sera graué & mis,
Afin d’estre le bien venu
Entre mes Seigneurs & amis.
A
Monsieur de Tyart.
Le grand sens & non petit art
Font haut renommer un
Tyart,
Vn Tyart haut de
nom, de fait,
Poëte & Orateur parfait.
A
Pierre de Ronsard, Poëte
du
Roy.
Ne creins, ne creins,
Ronsard, ce dous stile poursuiure,
Stile qui te fera, non moins que
l’autre, viure:
Antre obscure & scabreux, s’il ne
fait à blamer,
Si se fait il pourtant trop plus
creindre qu’aymer.
E 2
Au
68
EPIGRAMMES.
Au Lecteur.
Si ie fay de diferens Vers
Et mes Epigrammes diuers,
Le plus grand
Epigrammataire
Les souloit bien en ce point faire.
A un certain medisant
enuieux.
Tu dis mes Vers froids en couleurs:
Les tiens sont ils mieux colorez?
Tu dis mes Vers mal sauourez,
Mais tu n’en fais point de
meilleurs.
Raison de son voyage
à la Court.
Si les meres des oisillons
Par les buissons & les sillons
S’en vont là bechee chercher,
Pour l’aporter à leur fruit cher:
Qui est ce qui blamer pourra
Ma Muse, quand elle courra
Vers celle grand’ Court honorable,
Des Muses l’honneur, & la table?
Pour y rechercher cinq miettes,
Sauuans mes cinq de grans
disettes?
Mes
EPIGRAMMES.
69
Mes cinq petis, à brief parler,
Qui ne peuuent encor’ voler?
Mais quand, par temps, voler
pourront,
Eux mesmes ils en chercheront.
A
Monsieur de l’Aubépine, Tresorier
de
l’Espargne.
L’epine pique voirement,
Mais ce n’est pas donc cette ci:
Cette ci guerit meint tourment,
Et meint trauail & meint souci.
A
Iaques de Cambray, Conseiller, &
Aumonier du
Roy, Chancelier
de
Bourges &
Ambassa-
deur Ambassadeur
en
Trans-
syluanie Transsyluanie
.
Ton cler renom va bien auant
Auecques un lumineux ray
Luisant du Ponant au Leuant,
Par un lustre non faux, mais vray.
L’on entend ton
beau nom Cambray
Louer, & aymer tout ensemble:
Mercure ha ta
langue à l’essay,
Et ta barbe à
Phebus ressemble.
E 3
A Guil
70
A
Guillaume des autelz,
Poëte.
Apres tenir longues ou courtes
tables,
L’on se recree aux
cartes ou aux tables.
Mais le Poëte aux Vers tousiours
s’amuse,
Et n’a plaisir sinon auec sa Muse.
A
Remi Belleau, Poëte.
Bon Ami, tu as un beau nom,
Et par ton Apollon
renom:
Ton Nom conuient auec le mien,
Mon renom aproche du tien:
Car i’ay la Françoise
Fontaine:
Tu as Bell’eau,
bien viue & saine.
Excuses à ses amis, & amis
de sa Muse.
Nul ne vienne ma Muse mordre
Touchant cette ordonnance ou ordre
Que ie tiens en mes Epigrames,
Escriuant aux Seigneurs & Dames.
A la Poétique maniere,
Qui soit deuant ou soit derriere
Ou en honneurs, ou en cheuance,
Ie n’en pren si grand’ connoissance.
A P.
EPIGRAMMES.
71
A
P. de Ronsard.
A ta grand’ Muse industrieuse
Apollon donne
autorité:
Dont ton euure laborieuse
Sur le fort temps victorieuse,
Viura en la postérité.
A
Iean Dorat, Lecteur du
Roy
en l’Vniuersité
de
Paris.
Ton Nom tout d’or reluit en
France,
Reluit, treluit à suffissance:
Mais ton sçauoir plus que tout d’or
Te fait bien mieux reluire encor.
A
Monsieur du Parq, Historiographe
du
Roy, estant malade
à
Paris.
Fontaine aura
tresbelle Etreine
Quand son amy retournera
En bon heur, & en santé pleine:
Mais ce pendant l’estrenera
De l’immortelle eau de sa veine.
E 4
Au
72
EPIGRAMMES.
Au Lecteur.
Si ma Muse bien hault n’entonne,
I’emprunte bien peu de personne:
Et mes fruits sont bien recueillis
Qu’en mon iardinet i’ay cueillis.
A
Claude Laurencin, Seigneur
de
Riuirie.
Ie te connois & reconnois
Pour bon vray
Nestor
Lyonnois,
Chanu de chef, de mœurs, & d’ans
Et bien rond dehors & dedens.
A
Monsieur le Lieutenant
Bryau.
Chacun voit, comme außi ie voy,
En vous trois grans couleurs
ensemble,
L’honneur, la Vertu, & la Loy,
Loy qui au fin argent resemble.
Au
Chanoine Gauteret.
Deux ou trois ans Parisiens,
Et douze ou treize ans Lyonnois,
Nous trament ces beaux blancs liens
Que tu aymes & reconnois.
A l’Ec
EPIGRAMMES.
73
A
l’Ecuyer Caterin Iean.
Caterin reçoit mes
pacquetz
Et mes lettres, non pas d’acquetz:
Caterin aura ce
Quatrin,
Quatrin frais fait pour
Caterin.
Au
Receueur François
Coulaud.
Peu parler, & bien auiser,
La vigilance en ton office,
Auecques prudence propice,
Sont les points qui te font priser.
A
Iean Seneton, &
Iean de
Rochefort.
L’oncle & neueu sont double Fort
Qui se munit en double sorte
Pour defendre la maison forte
De Seneton &
Rochefort.
A
Monsieur de Vens.
Eolus est Seigneur
des Vents
Qui sont en nombre trentedeux:
Mais cure n’ha de luy ny d’eux
E 5
Ce
74
EPIGRAMMES.
Ce Lyonnois
Seigneur de Vens,
Qui prent tousiours en gré le temps:
Car pleuue ou vente, c’est tout un:
Auoir ne faut souci aucun
Des trente freres combatans.
A
Iean le ieune.
Ieune de nom, & ieune d’ans,
Mais meur de sens & bonne grace:
Prens ce Quatrein que ie te trace,
Car ton beau nom y luit dedans.
A
Marie Bourgeoise, petite fille
de cinq
ans.
L’on dit
Sapho Muse dixieme
Pour sa sçience en vers Lyrique:
Ie te diray la Muse onzieme
Pour ton bien chanter en Musique.
Au Lecteur.
De mes Epigrammes le nombre,
S’il te fait ennuy ou encombre,
Et te charge la quantité
Quand en as leu, ou récité:
N’en ly plus que trois en effait,
Tu auras incontinent fait.
Autre
EPIGRAMMES.
75
Autre.
Entre les grans ie n’omets pas
Les noms de mes plus grans amis,
Marchans en sçience à grans pas,
Par grans labeurs non intermis.
A ses amis.
Mes Vers d’etreines vont courans
Parmi les moyens & les grans:
Außi entend tout homme humain
Que l’on à cinq
doigts en la main.
Au detracteur.
I’ecri aux petis, ce dis tu:
I’enten qu’ils sont gens de vertu:
A ton sens, moqueur
Democrite,
Vertu est donc chose petite.
Autre.
Iadis un Roy mesloit bien sa
vaisselle
D’or & de terre, & si la
trouuoit belle.
A
Pierre Saliat.
Iamais ie n’auray oubliance
De l’amitié & alliance
Qui est honneste & vertueuse:
Y ha il chose plus heureuse?
Autre
76
EPIGRAMMES.
Autre à luy mesme.
Voy que ce grand faucheur refuse,
Mais ne sçauroit faucher ma Muse:
Muse non iamais assouuie
Du loz de l’immortelle vie.
A quelque detracteur,
euuieux.
Chacun epigramme à part soy
Ce n’est pas grand cas quant à toy:
Veux tu un mot qui tranche &
coupe?
Außi n’est-ce pas quant à moy:
Mais au moins valent ils en troupe.
Autre.
Tu dis que mes Vers sont petis:
Ils sont petis, ie le voy bien:
Ils sont petis, mais c’est du mien:
Petis aulx donnent appetis.
Autre.
Tu dis que mes Vers sont petis:
Tant plus tót les auras tu leuz:
Ils sont petis (di peu subtils)
Ils sont petis, mais non chetifs:
Ils sont petis, mais bien-voulus.
A un
EPIGRAMMES.
77
A un sien ami, nommé
la Tour.
Chacun me prend, & me prendra
(Dit il) pour toy, quand me verra,
Car ie te ressemble tant fort:
Contre chacun ne fay effort:
Chacun fera comme entendra:
Chacun dira ce qu’il voudra,
Mais si ne suis-ie point si fort.
A
Iean Fournaud.
Ainsi que ie me pourpensois,
Comment feray-ie recompense
A ses Vers Latins? mes François,
En nombre six tout à la fois,
Et tout à l’heure que i’y pense,
Se presentent tout en presence.
A
I. Gohorri, &
Cl.
Gruget,
Parisiens.
Et le païs, & le sçauoir,
Dont vos labeurs sont vrays
tesmoins,
Vos deux beaux noms vous feront voir
En un Quatrain: c’est pour le moins.
Aux
78
EPIGRAMMES.
Aux doctes Poëtes & Orateurs
en la langue Françoise.
Que me font Latins
anciens?
D’eux ie tire profit aux miens:
Si les miens n’entendent Latin,
Profit y auront, bien matin.
Ie vous voy grans esprits de
France,
Mettre la France
en florissance.
Poursuiuez (sus, là, hardiment)
En Prose & en Vers viuement.
Notre langue n’est si barbare
Que dit un latineur ignare.
Plutarque dit:
Chacun harangue,
Et escriue bien en sa langue.
A
Alexis Gaudin, Medecin
à
Bloys.
C’est un grand cas que l’alliance
Faite en Vertu, & en science!
Tu ne m’as veu, ie ne t’ay veu,
Qui es des meilleurs biens pourueu:
Et si sommes bien alliez,
Et des meilleurs liens liez.
Außi ie t’ay veu par escrit,
Ie t’ay bien veu en mon esprit.
A Iean
EPIGRAMMES.
79
A
George de la Boutiere.
Quatre quatrains bons & ouuerts
Ne te sufiroient pas encores,
Quand ia la
France tu honores
Et par ta Prose & par tes Vers.
A
Iean Citois.
Chacun n’a pas & l’entree &
l’honneur
Que ie te voy pour bon commencement:
Apres l’honneur ensuit tousiours bon
heur,
Au moins souuent, & plus
communement.
C’est peu de fait d’auoir auancement
Si l’honneur est delaißé en mespris:
Cheris le donq: car naturellement
Il suit ceux la qui lui rendent son
pris.
I.C.
Iean Citois
à
C.B.
Lyonnoise.
Incessamment depuis ta connoissance
Espoir en moy, d’une amour pure &
sainte,
A eu pour but ton honneste
acointance,
Ne querant mieux: tu le sais: ce n’est
feinte.
Ce doux maintien, auec de Dieu la
creinte,
Ioint à beauté, dont ie te voy
ornee,
T’ha de tout point, ô Pucelle bien
nee,
Outr’exaltee en grand loz &
honneur.
Ie tiendrois donq grande ma destinee
Si ie pouuois ATINDRE A CE BON
HEVR.
A elle
80
EPIGRAMMES
A elle encores, sur le commun
dire, que alliances sont
faites au Ciel.
Ie sçay fort bien que les Cieux ont
infus
Cette vertu en l’Ambre & en
l’Aimant
(Comme l’on voit)
d’atraire fer, fetus,
Bien qu’on n’en sçait la cause
proprement.
Garde n’auront toutefois bonnement
De s’acoupler, qu’un tiers ne les
approche:
L’astre außi
peu sert à deus s’entr’aymant,
Bonne amitié si premier ne les
touche.
Au Lecteur.
Veux tu sçaoir de Pucelle si gente,
Et de celuy qui meurt pour l’amour
d’elle,
Les noms, surnoms, que (pour cause) ie
cele?
Compris ils sont aux vers que te
presente.
A
H.D.R.
Lyonnoise.
Maints gens d’esprit osent prendre
l’audace
De te hanter, pour entrer en ta
grace:
Lesquelz tu sçais, d’un sçauoir moult
prouide,
Tous contenter, sans que ton loz s’en
change
Par mesdisans: & ne le trouue
estrange,
Veu que tousiours RICHE VERTV TE
GVIDE.
A auc
EPIGRAMMES
81
A aucuns de ses amis, qui s’esbahis-
soient s’esbahissoient
qu’il n’auoit esté
auancé par les
Princes.
I’ay des moyens (ie le say bien)
De rehausser mon petit bien:
Mais pour conclusion donner,
Ie n’ay le fait, ny le meintien
De flater, ny d’importuner.
A un quidam, affermant que
le Soleil n’est
essen-
ciellement
chault.
Le plus grand Ciel par son grand
mouuement
Cerne le Monde en un naturel iour:
Lune & Soleil vont plus
tardiuement,
Et chacun d’eux à part soy fait son
tour,
Qui est diuers à ce rauissement.
Le plus hault Ciel, à ton sot
iugement,
Vn accident ainsi violemment,
Deuroit trop plus donques luire &
flammer:
Et pourroit bien, mouuant si
roidement,
Tout l’Vniuers destruire & enflammer.
F
A luy
82
EPIGRAMMES
A luy encores
Qui que tu sois, il ne m’en chaut:
Mais si say-ie tresbien un point,
Que Philosophe tu n’es point,
Niant que le Soleil soit chault.
Encore contre cette folle
opinion.
Philosophie odieuse & nouuelle
Tu veux tenir, ô poure iugement!
Le Soleil ha, ce dis tu, seulement
Vne chaleur qui est accidentelle,
Acquise en luy par son seul
mouuement:
Ie dy qu’il ha sa chaleur naturelle,
Et par effait nous la demontre
telle.
Ne peut durer continuellement,
Si du subiet n’esteint l’essence
belle.
A un glorieux.
Tu veux l’honneur? il te fuira:
Ne le veux tu? il te suiura.
A un
EPIGRAMMES.
84
83
A un grand corrigeart.
En tes euures n’ay point apris
La douceur que me veux aprendre:
C’est bien fait, quand tu veux
reprendre,
Garde toy bien d’estre repris.
A
Iaques Pelletier.
Ton euure assez de louenge te donne,
Et ce flambeau par toymesme alumé
De tel honneur & splendeur
t’enuironne,
Que Phebus dit
qu’aurois trop presumé
Si ie pensois à ton Nom cler-aymé,
Donner clarté par la mienne
alumette:
Ou faire un vers plus net, & mieux
limé
Que ce beau vers de ta Muse tant
nette.
A
Monsieur Philander.
Quand Vitruue
retourneroit
(S’il faloit croire à
Pythagore)
En ton corps il retrouueroit
Que son ame reuit encore.
F 2
A l’Aut
EPIGRAMMES.
84
L’Auteur à sa chaste
Flora.
Si i’ay pouuoir de faire viure
Mon Nom, ainsi comme ie croy,
Mal gré commun mortel desroy,
Le tien viura, par le mien suiure:
Toy auec moy, moy auec toy.
Autre.
Tu es Florie &
de mœurs & de nom,
Tes mœurs me sont plus ordorans que
bâme,
Ton Nom plait fort, ô fleur sans aucun
blâme,
Tu floriras par eternel renom.
Encore, d’
elle
mesme.
Florie vingt mil
fois me lie
En ses vingt mil laz d’amitié,
Qui, de vingt mil Vers anoblie
Par ma Poësie polie,
Reluira trop plus qu’à moitié.
Ode,
ODE.
85
Ode, de sadite
Flora.
Depuis que le saint Ceste
Me ioint à mon
Alceste,
Plus libre ie me voy:
Chanteray-ie pas donques
La liberté qui onques
Ne faut en elle & moy?
Liberté vertueuse,
Et non voluptueuse
Dont la fin n’est qu’esmoy:
Ie la chanteray ores,
Rechnateray encores,
Car chanter ie la doy
Macrin à la
louenge
De sa Gilon se
renge,
Et moy à ma
Flora:
De qui la floriture
Ma Muse en sa peinture
Par tout demontrera:
F 3
Ma
86
ODES.
Ma Muse libre chante,
Et Flora libre
vante
Au saint lien
d’Amour:
Duquel la ligature
Etroite libre, & pure,
Nous lasse tout autour:
Et sans lasser nous lasse,
Relasse & entrelasse
En mille enlassans las:
Car de telle enlassure
Qui libre nous assure
Iamais ne sommes las.
L’Auteur à ses cinq
Florons, qui
sont les cinq petis enfans de
de luy,
& de sa
Flora.
Par mes cinq labeurs pouuez voir
Comme à bien ie vous veux induire:
D’obeïr faites bon deuoir,
Et bon deuoir feray d’instruire.
Bonauent
EPIGRAMMES.
87
Bonauenture du Tronchet,
à
l’Auteur.
De tes Ruisseaux le cours tant
gracieux,
Va coulant doux par notre heureuse
France,
Y apportant certeine connoissance
Combien vers toy sont prodigues les
cieux.
Chassant de toy le soing ambicieux
(Qui du vray bien forclot la
iouïssance)
Tu vas chantant
d’Amour la grand’ puissance,
Ses feuz, ses traits, ses faits
audacieux.
On voit tousiours ta bouillante
poitrine
En ta fureur, par ta
Flora diuine,
Mettre en auant vos immortalitez.
Ie prie Amour,
Amour qui nos cœurs lie,
Permettre ainsi que ma haute
Thalie
Ayt par mes Vers ses honneurs
meritez.
A
Apollon, pour ledit
Fontaine.
O cler Phebus, qui
en cette Fontaine
Vas inspirant par ta force hautaine
Vn cours bruyant mille immortalitez,
Recompensant ses guerdons meritez,
Sois luy tousiours tant doux, & tant
propice,
Qu’en exerceant dessous toy son
office,
Pour un bon heur cent luy soient
suscitez.
F 4
Resp
88
EPIGRAMMES.
Responses par
l’Auteur audit
du Tronchet.
Pour un bon heur t’en soient suscitez
mille,
Mil millions que tu as meritez,
Par ton Amour, & ta Muse
gentille,
Mil millions de grans prosperitez.
Au
Seigneur Louïs des
Masures.
Ioye & douleur, contraires
paßions,
D’un doux amer ont repeu ta docte
ame:
Tes Vers plaintifs &
lamentations,
Monstrent le dueil qui trop ton cœur
entâme:
Ta lettre außi de Liesse ha le bâme,
Qui adoucit le coup de l’amertume.
Poëte amy, le Poëte
l’’on blâme,
Qui tousiours trempe en triste ancre sa
plume.
Réponse à
Charles Fontaine.
De Fortune ie ne me plains,
Ayant la douceur sauourée
Dont les Vers sont plains
En l’euure par toy labourée.
Ayant
EPIGRAMMES
89
Ayant de toy receu encor
L’ofre de ton amitié bonne,
A moy plus precieuse qu’or,
Ny perle que l’Orient donne.
Cette amitié veux-ie extoller:
De qui l’honneur par moy s’entende:
Et si auant puisse voler
Que l’Uniuers tant ne s’estende.
A ton pris toute autre vertu,
Bien que (modeste) tu la cœuures,
Sonne plus qu’à l’airain tortu
Par les Muses, & par tes
euures.
Ie prise donques l’amitié,
Present de grace singuliere:
Qui entre nous deux par moitié
Demeure à iamais familiere.
Pas ne bruiroit tant à demy
Le renom qui auiourdhui reste,
Sans la seure foy de l’amy
Qui de bon cœur suiuit
Oreste.
Or puis que par le don des Dieux
Ie reçoy l’heur tant desirable,
Et que de mon nom studieux
Tu te rends à moy fauorable.
Par ta dextre, & la sainte foy,
Ie t’obteste & requier
(Fontaine)
F 5
Que
90
EPIGRAMMES.
Que l’ofice & labeur de toy
Me donne quelque heure certaine:
Si qu’à l’imprimer de mes vers,
Dont en ton sçauoir ie me fie,
L’ordre se garde aux lieux diuers
Des points, & de l’ortorgrafie.
Sur les motz ne soit entrepris:
Les changer à nul il ne chaille,
Pour d’autruy n’usurper le pris,
Ou que par autrui ie ne faille.
Or tout à ta foy ie commetz:
Laquelle à mon secours i’inuoque.
En ce pendant pour tout iamais
Reçoy la mienne reciproque.
De la mort de
Iean Prunier,
Receueur de
Lyonnois
&
Forest.
La noire dame auec son dard
Ce grand Prunier ha
abbatu,
Non tant par force ou par vertu
Comme par un traiturier art:
Car ce Prunier de
part en part
Enraciné en bonne terre
Y tenoit bien fort, & bien serre,
Pour ne tomber si tót, mais tard,
Si n’eust
EPIGRAMMES
91
Si n’eust esté la trahison
De celle Dame sans raison,
Mais plus tót furie orde & nue
Cachee souz la continue,
Qui l’ébranla, puis l’abbatit,
Mais maint reietton en sortit.
Ces reiettons, ô masque noire,
Tout malgré toy reuerdiront,
Et bons & beaux fruits
produiront,
Dont sera la tige en memoire.
Contre fortune bon cœur.
Si fortuna tonat, caueto mergi.
ODE.
I’ay veu le tems außi noir que la
poix.
I’ay veu les vents desbridez & sans
Loix,
I’ay veu, par fois, vents, tempeste
& tonnerre
Arbre arracher, ruer maisons par
terre.
Iusques aux cieux i’ay veu monter la
mer,
Iusqu’aux enfers ie l’ay veuë abimer:
I’ay ce pendant veu la póure nauire
Qui çà & là, haut & bas tourne
& vire.
Ma
92
EPIGRAMMES
Ma Muse iointe à la haute Vertu,
N’a point permis que fusse onq
abbattu:
Plus haut qu’Enuie eleueray ma
teste,
Guignant ça bas mer, vent, foudre &
tempeste.
Au Lieutenant
Touchet
d’Orleans.
Ie n’ay amitié qui me touche
De plus pres, ami, que la tienne,
Bien éprouuee par la mienne
Ainsi comme l’or à la Touche.
Au Secretaire
Grauier
Si tu me porte amitié saine,
Cela n’est pas chose nouuelle:
Car, par la raison naturelle,
Le grauier porte la fontaine.
A
René Chandelier.
Vne prompte dextérité
Remplie de vertueux zele,
T’est une chose naturelle,
Naturelle en viuacité.
A Franç
EPIGRAMMES.
93
A
François l’Archer.
Hausse ici ton beau chef, ma Muse,
Et marche d’un pas plus hautain,
Pour saluer l’ami certain,
Qui iamais iamais ne refuse
De me voir, & d’ouir ma Muse.
Contre aucuns par trop Se-
ueres Seueres
censeurs.
Mes petits vers en stile bas
Que ma Muse voulut elire,
Sont les passetems & ebas
Ou ie ne puis ne me deduire:
Mais à qui donq peuuent-ils nuire?
Estre facheux? ou mal-plaisans?
Fors aux Stoïcs, que
l’on peut dire
Graues, sourcilleux, & pesans?
Autre.
Qui ha plus haut et riche stile,
Si l’admire, & le garde bien:
Mais au moins ne suis inutile
Ny chiche de mon petit bien.
Ce petit talent ancien
Que Dieu m’a donné, ie ne cache:
Si le
94
EPIGRAMMES.
Si le talent nouueau ha rien
Meilleur, ie veux bien qu’on le
sache.
Autre.
Mais si feray-ie encores bruire
Cent traits de ma Muse Françoise,
Pour eblouïr, etonner, cuire,
À mon Censeur qui mes Vers croise:
Bien qu’à mon cœur son fait peu
poise,
Ie sens ia renforcer ma Muse,
Dont la splendeur, ou que ie voise,
Me sera bouclier de
Meduse.
A
Monsieur de la Source,
Rece-
ueur Receueur
de
Lyonnois.
Ma veine par France coulante
Court vers vous sa petite course:
Car c’est bien chose conuenante
Que la fontaine ayme la
Source.
De trois siens amis
Mede-
cins Medecins
à
Paris.
Quiconque est pres de ce grand
Herebus,
Horrible & noir, à fin qu’il s’en
retire,
Ne quiere point en la
Grece
Phebus,
Ni Machaon
auecques Podalyre:
Ne
EPIGRAMMES.
95
Ne voise aux prez, pour des herbes
elire:
Mais quiere droit
Fernel, Granger,
Planson:
Qui feront plus, si
l’on croit à leur dire,
Qu’Orpheus ne fit
par sa forte chanson.
A
Pontus de Tyart,
Maurice
Sceue, &
Guillaume
des
autelz.
Vos clers-vifs esprits bien ouuers
Montrent vos Proses & beaux Vers
En notre langue maternelle:
(Mais que ne dy-ie paternelle?)
Beaux Vers qui point ne tomberont,
Ains tousiours sur leurs piez feront:
Sinon que la langue Françoise
Tombast un iour en Ecossoise.
A
Monsieur de Iugerie Medecin
de
Monsieur le Cardinal de
Lorraine.
La Muse ha un long souuenir
De l’amitié dont on luy use:
Et les tems & gens à venir
Lou’ront ton amour & ma Muse.
Au
96
EPIGRAMMES.
Au
Protenotaire de la Saulx.
Comme le saule, arbre utile &
plaisant,
Se resiouit aux ruisseaux de
fontaine,
Ainsi la Saulx, ami
plaisir faisant,
Ayme & cherit ces beaux Vers de ma
veine.
A
Charles de la Porte.
Quand ma Muse ses Vers vous porte,
Vous ne luy fermerez la porte:
Car c’est par la grace & le bien
Des Muses, que vous portez bien.
A
Bartelemi Teste.
Amitié demande amitié:
Bonne amitié tu m’as montree,
Et de moy ne l’as rencontree
Encores, sinon qu’à moitié:
Toutefois ma Muse s’apreste
Pour orner un iour cette teste.
Au Tresorier
Ferrier.
Puis qu’aymez donc ouir & lire
Mes Vers François, receuez or’
De cette Muse ce tresor,
Qu’elle vient tout nouueau produire.
Au
EPIGRAMMES.
97
Au
Seigneur de
Villette.
Qui dit que ma Muse valette?
Mais elle honore les amis:
Entre lesquels tu seras mis,
Orné du beau nom de
Villette.
A
Iacques Dalechamps,
Medecin.
Tu marche auant dedens les champs
De l’immortelle Medecine,
Chassant maux les mortels fauchans,
Amy, & voisin
Dalechamps:
Außi auec science insigne
Tu as une grace diuine.
A
Iean de Sylua, aussi
Medecin.
Suiuant la trace paternelle,
L’heur, & l’honneur qui sont en
elle,
Tu ne peux qu’a tout bien venir:
A quoy te peuuent parfournir
Sauoir, ieunesse, & vertu belle.
G
A ses
98
EPIGRAMMES.
A ses vrays amis.
Les gens presens, & qui sont à
venir
De siecle en siecle en heureuse
affluance,
Auront un long un treslong souuenir
Que vous auez à ma Muse alliance,
Qui me mettroit plus tót en oubliance
Que cette amour qu’a elle & moy
portez:
Et retenez ce seul mot à fiance,
Tous vos grans biens ne vous feront point
tels.
Le but de l’Auteur.
Puis que l’homme est de Dieu l’image,
En l’honorant i’honore Dieu:
Mesme quand maint grand personnage
I’honore, qui tient maint grand lieu.
A
Iaques de Cambray, Conseiller &
Aumonier du
Roy, Chancelier
Bourges.
Par fois aux grans Seigneurs
i’adresse
Quelques gentils petis quatrains,
Se haussans en leur petitesse
Iusqu’à hanter les plus hauts trains
De race & Noblesse hautains.
Sans se rabaisser, ou rabatre,
Par fois außi se font certains,
Que quelcun d’eux en vault bien
quatre.
P. de
EPIGRAMMES.
99
A
P. de Ronsard.
Nous auons perdu ton
Brinon:
Perdu? tu me diras que non:
Car tousiours l’auons en memoire,
Qui ferons blanche sa mort noire.
M. Chassagnon à
l’Auteur.
Par moyen de cheual
Pegase
Vint la Fontaine
Caballine:
Par moyen d’un diuin extase
Nous vient la tienne belle, insigne:
L’une est terrestre, mais diuine
L’autre voyons apertement:
L’une qui ha profondement
En terroir Grec,
n’est mesprisee,
L’autre qui l’a diuinement
Doit el’ pas mieux estre prisee?
Autre.
La Seine, en son
eau bonne à boire,
La Saone, auec
son pas douteux,
Auec son eau loing-courant,
Loire,
Le Róne en son
cours rioteux
Nous garde d’estre souffreteux
G 2
Des
100
EPIGRAMMES.
Des biens à nos corps profitables:
Si cela les rend honorables.
Plus d’honneur soit à toy,
Fontaine:
Car de l’esprit les biens durables
Nous parfournit ta Muse humaine.
Response par
l’Auteur.
Pegase,
Seine, Saone,
Loire,
Et Róne roidement
roulant,
Sont & seront bien en memoire
Mal gré le faucheur violant,
Et le siecle tousiours volant:
Mais quant à ma fontaine clere,
En sa Muse, qui luy eclere,
Par France long
temps coulera:
Et par mon Apollon
i’espere
Que d’elle & moy
l’on parlera.
A ses Bons amis, amateurs
des Muses.
Homere aueugle
benissoit
Par ses Vers Grecs ses bons amis:
Par ses Vers außi maudissoit
Et coniuroit ses ennemis
D’un stile non láche & remis.
Archil
EPIGRAMMES.
101
Archiloc fit bien
le semblable,
Quand d’un stile agu effroyable
Contreignit Lycambe
à se pendre:
Mais ma Muse ne veult pretendre
Fors à dire tout bien de tous:
Entre lesquels pouuez entendre
Que les mieux venus serez vous.
Du bon vouloir & espoir de
l’Auteur.
Si Lachesis en mon
endroit n’est lasche,
Ie parleray, aydant
Phebus, ma tasche:
Tasche que i’ay pour Vertu
entrepris,
Et qui aura sus mes euures le pris.
Antonius Perardus ad Lectorem.
Fontani Musam
mellitaque carmina, Lector,
Et quas huic vires Gallica lingua
dedit,
Cùm bene gustaris, iure admirabere
mecum:
Ac dices, vatis nomine dignus hic
est.
L’Auteur à
Antoine
Perard.
Ce nom Perard, amy
Perard,
Me sent ie ne sçay quoy de hault:
Et l’equiuoque n’y deffault,
Car tout en toy se fait par art.
G 3
Resp
102
EPIGRAMMES.
Response par ledit
Perard
Quam mihi das artem, ni tu
Fontane dedisses,
Fonti par poterat fortisan esse tuo.
L’Auteur à
Antoine Perard,
&
à tous ses meilleurs
amis.
Si i’ay une simplicité
Auecques bien peu de parole:
Si i’ay par foys néceßité
Du bien mondain qui tost s’enuole:
Si iou’ray-ie si bien mon rolle
Que toute France
m’entendra:
Et le plus Braue à mon école
Et dessous ma Muse aprendra.
Ad
Carolum Fontanum,
Io. Fournaudi te-
trastichon. tetrastichon.
Te tua mortalem mater genuisse
putabat:
Longius at viues
Nestore, Carole
mi.
Non, quæso, indocti cures ludibria
vulgi,
Cùm placeas doctis, queis placuisse sat
est.
L’Aut
EPIGRAMMES.
103
L’Auteur à son filz
Iean
Fontaine.
Fay peu d’amis, & à loisir:
Tu en auras moins de plaisir,
Mais außi moins de desplaisir.
Autre, à son petit filz
Iaques
Fontaine.
Mon filz Iaques, le
bien i’acqueste,
Qui par la mort ne perira:
Mon filz Iaques,
fay moy donc feste,
Et puis ma Muse te rira.
A
Pierre Voeriot, lors
qu’il pourtrayoit
l’Auteur.
De ma plume le petit trait,
Amy, si tu me pourtrais bien,
Te rendra encor mieux pourtrait
Que ce doux trait du pinceau tien
Ne va trassant ce pourtrait mien.
G 4
Od
104
Odelette.
A petit de frais s’entretient
Le Poëte en sa douce veine:
Et rien d’auarice ne tient
Cil qui ha le nom de
Fontaine.
Trente amis trente blocs d’escus,
Raclans de leur extr’ordinaire,
Feroient reuiure leurs vertus
Ayans Poëte debonnaire.
Cent escus ils ne plaindront pas
En menus plaisirs & delices,
Qui seront apres leur trespas
Cent braues tesmoins de leurs
vices.
Voyant les gens tant aueuglez
Apres le vice allans si vite,
Si deprauez, si desraiglez,
Volontiers me rendrois Hermite.
HANTE LE FRANCOIS.